Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

union européenne - Page 8

  • Conditions de validité d'une coopération renforcée

     

    Les conclusions de l'avocat général de la Cour de justice de l'Union européenne, publiées le 11/12/2012 font une synthèse intéressante des conditions que doit remplir la décision d'instaurer une coopération renforcée pour être valide. 

    En mars 2011, le Conseil a autorisé une coopération renforcée en vue de créer une protection des inventions par brevet unitaire entre 25 États membres (sur les 27 de l’Union). La voie de la coopération renforcée avait été choisie parce qu'après des années de négociations, il était toujours impossible d'obtenir un accord de tous les états membres.

     

    L'Espagne et l'Italie seules ont refusé d’y participer mais elles ont contesté devant la Cour de justice de l'Union européenne la validité de la décision du Conseil dont elles demandent l'annulation. Les moyens invoqués à l'appui du recours sont:

     

    1. L'incompétence du Conseil pour prendre une telle décision : la création d’un brevet unitaire relèverait des compétences exclusives de l’Union et, notamment, de l’établissement des règles de concurrence nécessaires au fonctionnement du marché intérieur. Or, les États membres ne peuvent exercer une coopération renforcée que dans les domaines relevant de la compétence non exclusive de l’Union. L'argument est réfuté par l'avocat général dans ses conclusions: la création d'un brevet attestant une propriété intellectuelle relève du marché intérieur, qui est une compétence partagée entre l’Union et les États membres.

    2. Le Conseil se serait livré à un détournement de pouvoir. Mais les coopérations renforcées, rappelle l'avocat général, ont pour but de favoriser la réalisation des objectifs de l’Union, de préserver ses intérêts et de renforcer son processus d’intégration. En l'espèce, le Conseil n'a fait qu'utiliser un outil que lui confèrent les traités pour surmonter un blocage.

    3. la décision viole lesystème juridictionnel de l’Union, car elle ne précise pas le régime juridictionnel envisagé en matière de brevet unitaire. Mais selon l'avocat général, la création d’un système juridictionnel propre aux brevets unitaires ne fait pas partie des conditions requises par les traités pour la mise en oeuvre d’une coopération renforcée, l’autorisation donnée par la décision du Conseil pour la mise en place d’une coopération renforcée n'étant que la prémisse de l’adoption d’autres actes législatifs pour en assurer la mise en oeuvre concrète.

    4. Le Conseil a méconnu la condition du dernier ressort requise pour instaurer une coopération renforcée (celle-ci est en quelque sorte, une solution "ultime" quand les autres moyens de parvenir aux objectifs recherchés dans un délai raisonnable ont échoué). Mais, observe l'avocat général, les traités ne définissent ni la condition du dernier ressort ni la notion de délai raisonnable. Selon lui, le dernier ressort peut très bien être le constat de l’existence d’un véritable blocage qui pourrait survenir à tous les niveaux du processus législatif et qui atteste de l’impossibilité d’aboutir à un compromis, sans qu'il soit nécessaire d'attendre la fin du processus législatif et le rejet d'une proposition de loi.

    5. La décision du Conseil porterait atteinte au marché intérieur et à la cohésion économique, sociale et territoriale, elle constituerait une entrave et une discrimination aux échanges entre les États membres et elle provoquerait des distorsions de concurrence entre ceux-ci. Cette crainte est prémlaturée, objecte l'avocat général qui rappelle que le contrôle juridictionnel de la décision d’autorisation ne peut pas se confondre avec le contrôle des actes adoptés par la suite pour son application.

    6. Les compétences, les droits et les obligations des États pays qui ne participent pas à la coopération renforcée sont méconnus. Là encore, l'avocat général réfute ce sixième et dernier moyen et propose dans ses conclusions de rejeter le recours de l'Espagne et de l'Italie.


    Les conclusions de l'avocat général, il faut le rappeler, ne lient pas la Cour de Justice (l'avocat géneral donne un avis juridique que les juges sont libres de suivre ou non). Mais elles permettent souvent de préjuger de ce que sera l'arrêt de la Cour. 

    11/12/2012, Conclusions de l'avocat général dans les affaires jointes C-274/11 et C-295/11, Espagne et Italie / Conseil

     

    Domaguil

     

  • Le Parlement européen doit siéger en France

     

    Voila que la Cour de justice de l'Union européenne est de nouveau sollicitée pour dire le droit dans la "guerre" du siège du Parlement européen. Tel un marronnier médiatique, cette question ressurgit de façon périodique. Elle oppose les partisans du siège double actuel (à Strasbourg qui est le siège officiel en vertu du traité et à Bruxelles) et ceux qui veulent un siège unique (à Bruxelles) au nom des économies budgétaires et de la lutte contre les tracas et surcharges de travail inutiles que causent les fréquents déplacements des eurodéputés entre Bruxelles (où sont les commission parlementaires) et Strasbourg (où se tiennent les sessions plénières de l'assemblée).

    Parmi les défenseurs du siège unique on trouve le Royaume-Uni et dans ceux du statu quo la France, qui on l'imagine, s'insurge dès que la fixation du siège à Strasbourg est contestée. Comme il fautrait réviser le traité pour changer cette localisation et que cette révision ne peut être faite qu'à l'unanimité, le déménagement est impossible tant que la France s'y oppose.

    Plusieurs moyens ont alors été envisagés pour tenter de contourner l'obstacle et le Parlement européen a mis au point une "astuce" consistant à découper les sessions plénières pour, au moins, limiter les aller retours entre Bruxelles et Strasbourg au détriment de cette dernière ville.

    Le traité dispose que le Parlement se réunit en douze périodes de sessions plénières mensuelles par an sans préciser la durée de ces périodes de sessions plénières. Il est de tradition (validée par la jurisprudence de la Cour) que les périodes de sessions plénières ordinaires, d’une durée de quatre jours, se tiennent à Strasbourg, alors que les périodes de sessions additionnelles ont lieu à Bruxelles et que deux périodes de sessions plénières ont lieu à Strasbourg au cours du mois d'octobre pour compenser l’absence de session plénière en août. Mais en 2011, le Parlement a adopté des délibérations pour modifier le calendrier des périodes de sessions pour 2012 et 2013: pour les mois d'octobre 2012 et 2013, une des deux périodes de sessions plénières de quatre jours prévues pour chacun de ces mois a été supprimée et, d’autre part, les périodes de sessions plénières d’octobre 2012 et d’octobre 2013 restantes ont été scindées en deux (deux périodes de sessions plénières distinctes, de deux jours chacune, ont été prévues au cours de la semaine des 22-25 octobre 2012, et deux durant la semaine des 21-24 octobre 2013).

    Evidemment, l'“astuce“ n'a pas été du goût du gouvernement français qui a saisi la Cour de justice de l'UE pour lui demander d'annuler les délibérations en faisant valoir qu'elles violent les traités et la jurisprudence de la Cour.

    C'est chose faite avec l'arrêt du 13 décembre 2012 (CJUE, 13/12/2012, aff.jointes C-237/11 et C-238/11, France / Parlement), qui constate que les périodes de sessions prévues par les délibérations pour octobre 2012 et octobre 2013 ne répondent pas aux exigences fixées par les traités sur le siège des institutions. Les périodes de sessions plénières d’octobre 2012 et 2013, scindées en deux par le Parlement, ne peuvent être qualifiées individuellement de périodes de sessions plénières mensuelles, explique le juge : "En effet, par rapport aux périodes de sessions plénières ordinaires, le temps effectif disponible pour les périodes de sessions au cours de ce mois est réduit de plus de la moitié“ (considérant 56).

    Certes, la compétence des états pour fixer le siège du Parlement doit tenir compte de la compétence d’organisation interne de celui-ci. Mais la Cour rejette les arguments présentés par le Parlement pour justifier ses délibérations par son pouvoir d’organisation interne. Ni l’accroissement continu des compétences de l'assemblée, ni les inconvénients et les coûts engendrés par la pluralité des lieux de travail ne peuvent être retenus. Les délibérations sont donc annulées...jusqu'à la prochaine offensive.

    Domaguil

  • Permis de conduire unique pour les européens

     

    Depuis le 19 janvier 2013, les nouveaux permis de conduire délivrés dans les pays membres de l'Union européenne se présentent sous une forme unique, celle d'une carte semblable aux cartes de crédit, plastifiée, de même format et pourvue de dispositifs de sécurité renforcés. Seule la France a repoussé l'application de cette mesure pour des raisons trechniques: il faudra donc attendre septembre 2013 pour que le permis européen soit délivré. En attendant, les nouveaux conducteurs, ou ceux qui nécessitent un duplicata à la suite de vol, de perte, de détérioration du document, se verront attribuer un permis selon un modèle "transitoire" (permis rose en trois volets similaire au permis ancien rose mais comportant des modifications conformes au permis européen et qui seront maintenues dans le format carte à puce). 

    La première législation européennne sur les permis de conduire remonte à 1980: la directive 80/1263 créait un modèle communautaire de permis national et imposait la reconnaissance réciproque par les états membres des permis de conduire nationaux. D'autres textes avaient suivi mais l'application des règles communes avait été difficile du fait des durées de validité différentes des permis selon les pays et parce que la périodicité des examens médicaux n'étaient pas harmonisées. Résultat: un changement de résidence pour s'installer dans un autre pays de l'UE tournait au casse-tête pour les titulaires de permis qui ne savaient pas à quelle loi se vouer. Sans compter le véritable défi auquel sont confrontés les agents chargés de la sécurité routière sensés pouvoir reconnaître plus de 100 modèles différents de permis de conduire, en papier ou en plastique.La directive 2006/126 du 20/12/2006 ( «troisième directive relative au permis de conduire»)a pour objectif de mettre fin à ces difficultés, grâce notamment, à un modèle unique de permis de conduire de l'Union européenne et des obligations uniformisées.

    Jusqu'à présent, les permis de conduire comportent plusieurs failles (photos d’identité souvent beaucoup trop anciennes, catégories de véhicules que le conducteur est autorisé à conduire peu claires) et de manière générale, sont plutôt faciles à falsifier. Afin d'améliorer la sécurité et de rendre la falsification plus difficile voire impossible, le nouveau permis de conduire comporte différents dispositifs de sécurité. Les états membres peuvent aussi, s'ils le décident, placer une puce électroniquedans le permis reprenant les informations imprimées sur la carte. La législation sur la protection des données à caractère personnel doit être respectée mais cette "filature électronique" supplémentaire est critiquée.De plus, la création d’un système européen d’échange de données électroniques doit faciliter la circulation de l’information entre administrations nationales afin de simplifier les procédures de traitement des permis de conduire des personnes qui changent de pays membre de résidence en seront simplifiées, mais aussi de décourager la fraude. Grâce à ce système d'échange d'informations (réseau RESPER), en effet, il sera plus facile pour les états de vérifier avant la délivrance d'un permis de conduire, que le conducteur ne se l'est pas vu retirer, suspendre ou limiter dans un autre pays membre.

    Le permis n'est plus "à vie" mais devra être renouvelé tous les 10 à 15 ans, en fonction des états, pour les voitures et les motos. Cette obligation de renouvellement a pour but d’assurer que les informations, photos, etc. ..des permis sont tenues à jour, que les dispositifs de sécurité des cartes sont régulièrement actualisés et que les états membres disposent en permanence de données à jour sur les permis en circulation. Il s'agit donc d'un renouvellement "administratif". Le conducteur ne sera donc pas obligé de passer un nouvel examen ou un test supplémentaire à cette occasion. De même, en ce qui concerne les examens médicaux, les états membres restent libres d'imposer ou non des examens périodiques.

    Les conducteurs d’autocars et de poids lourds seront quant à eux tenus de renouveler leur permis tous les cinq ans et de passer alors un examen médical.

    Quant aux permis existants, ils seront remplacés pour passer au nouveau format en cas de renouvellement ou d’ici 2033 au plus tard.

    L'entrée en vigueur de la directive se traduit également par des exigences renforcées pour l'obtention du permis. Par exemple: un âge plus élevé pour l’accès direct (après épreuves pratiques et théoriques) aux permis des motos les plus puissantes : 24 ans au lieu de 21 actuellement et des étapes d'apprentissage en exigeant une expérience préalable de la conduite de motos de moindre cylindrée d’au moins quatre ans (deux actuellement) avant de pouvoir obtenir un permis de conduire les motos les plus puissantes. Une autre innovation de la directive concerne la conduite des cyclomoteurs: une épreuve théorique sanctionnée par un permis de conduire (nouvelle catégorie de permis AM) est imposée (les états pourront décider de la compléter par des tests d’habileté et de comportement et des examens médicaux). La directive fixe aussi un âge minimum recommandé de 16 ans à partir duquel ce permis est mutuellement reconnus dans tous les États membres (mais un État membre peut abaisser ce seuil jusqu’à 14 ans sur son territoire).Ces nouvelles règles conduisent à la création de six nouvelles catégories de permis qui s'ajoutent aux neuf actuelles.

    Enfin, la directive impose le respect d'un certain nombre de critères minimaux standard en matière de qualification initiale et de formation continue. L'accès progressif devrait être obligatoire: dans un premier temps, les examinateurs doivent se limiter aux épreuves de conduite de voitures particulières, qui représentent 90 % de l'ensemble des épreuves, et ce n'est qu'après avoir acquis une expérience suffisante dans cette catégorie d'épreuves et obtenu une qualification supplémentaire pour d'autres catégories qu'ils pourront évaluer les candidats dans les autres catégories.

    Les autres points, par exemple, celui de savoir si le nouveau permis sera gratuit ou payant et dans ce dernier cas, combien il coutera, doivent être définis par les états.

     

    Domaguil

     

  • L'étau européen se resserre peu à peu autour des contribuables fraudeurs

     

    Alors que "l'affaire Depardieu" n'en finissait pas de "feuilletonner", faisait les délices des medias français, voyait les people (mais pas seulement) s'écharper pour défendre ou accuser le célèbre "évadé fiscal", de nouvelles règles européennes pour lutter contre la fraude fiscale dans l'Union européenne entraient en vigueur.

    La fraude fiscale se distingue de l'évasion fiscale en ce sens qu'elle constitue forcément une infraction. L'évasion fiscale est la décision d'un contribuable qui s'estimant trop taxé dans son pays décide ...d'aller se faire imposer ailleurs sans pour autant obligatoirement frauder les règles du droit fiscal. C'est, du moins si l'on en croit les informations données, le cas de Gérard Depardieu livré à la vindicte populaire par le gouvernement au nom d'un "devoir patriotique" qui lui ferait obligation d'adhérer à une politique et des choix qui ne sont manifestement pas les siens. On nous abreuve à longueur de journée de discours emphatiques sur la démocratie, le respect des droits, et voila que l'on dénie à une catégorie de la population, les riches, forcément affreux et odieux, le droit élémentaire de vivre où ils veulent et d'affirmer leur désaccord avec la politique du pays.

    N'en déplaise aux moralistes du dimanche, c'est bien la fraude fiscale qui est sanctionnable. En attendant de pouvoir guillotiner tous ceux dont les revenus excèdent le plafond toléré par les accusateurs publics et de créer un délit de manquement à l'éthique sociale, il faudra bien s'en contenter.

    La lutte contre ce fléau qui obère les budgets déja vacillants de nos états bénéficie de nouvelles armes depuis 1er janvier 2013 grâce à l'entrée en vigueur de la directive du 15 février 2011 qui renforce la coopération administrative dans le domaine fiscal (directive 2011/16/UE du 15 février 2011 relative à la coopération administrative dans le domaine fiscal et abrogeant la directive 77/799/CEE).

    Ces nouvelles règles ont pour but de mettre les états en mesure de calculer plus précisément et de récupérer les sommes qui sont dues par les contribuables et qui n'auraient pas été payées. L'innovation majeure de la directive est qu'elle met fin au secret bancaire entre les pays de l'Union européenne : un État membre ne pourra plus refuser de communiquer des informations à un autre État parce qu'elles sont détenues par un établissement financier.

    Une autre disposition également très remarquée, car elle renforce l'efficacité de la lutte contre la fraude, est l'obligation pour chaque état membre de faire bénéficier ses partenaires européens du même niveau de coopération qu'il a organisé avec un pays tiers si cette coopération est plus étendue que celle prévue par la directive (article 19), une disposition que l'on peut comparer à celle de la «nation la plus favorisée» dans les règles du commerce international.

    Mais le pas fait avec la directive 2011/16 est jugé insuffisant.

    Ainsi le député Gilles Carrez rappelait-il en 2011 que pour combattre la fraude fiscale sur "l’ensemble des revenus de l’épargne perçus directement ou indirectement par les particuliers", d'autres textes, qui complètent la directive 2011/16 doivent être adoptés. C'est le cas, en particulier, de la révision de la directive 2003/48/CE du Conseil du 3 juin 2003 en matière de fiscalité des revenus de l'épargne sous forme de paiements d'intérêts (« Directive épargne »). Celle-ci dispose que les revenus de l'épargne perçus sous forme de paiement d'intérêts dans un état membre par un contribuable résidant dans un autre état membre sont imposés conformément à la loi fiscale de l’État de résidence. Pour cela, la directive prévoit deux moyens: l'échange automatique d'informations entre les états concernant les paiements et, pendant une période transitoire, l’application, par l’état d’où proviennent les intérêts payés, d’une retenue à la source sur les paiements d’intérêts avec versement de la quasi totalité de cette retenueà l’état de résidence du contribuable.

    Mais les états restent divisés sur la fin de la période transitoire, certains, à l'instar de l’Autriche et du Luxembourg, demandant sa prolongation, d'autres contestant le maintien du système de la retenue à la source et demandant la généralisation de l’échange automatique d’informations pour l’ensemble des revenus de l’épargne, et non pas les seuls paiements d'intérêts. Bref, la transparence fiscale ce n'est pas encore pour demain.

    Plus de détails dans l'article sur le site eurogersinfo.

    Domaguil